Surfer au Québec vient avec la certitude que nous allons un jour en sortir pour essayer des vagues en océan. Nous allons planifier, voyager et rencontrer des gens qui ne comprennent pas comment un surfeur québécois a abouti dans le monde du surf. Il m’est souvent arrivé d’avoir à décrire en quoi le surf de rivière m’a préparé pour l’Océan. Lorsque les gens voient que je surfe un peu avec aisance (c’est ce que j’aime penser), je me fais toujours demander la question classique: « But isn’t Montreal far from the Ocean? »

Yes, indeed. Mais nous avons tout de même une des plus grandes rivières du monde qui nous a permis de comprendre le fonctionnement d’une planche de surf. Voyons en quoi il est utile de surfer en rivière pour mieux se débrouiller en océan.

Ce qui est surprenant avec le surf, c’est que la plupart des techniques apprises dans l’Océan ne servent pas en rivière. Il ne faut pas passer de break, il n’y a pas de set et c’est la vague qui nous attend, non le contraire. Alors que la vague d’océan va déferler et n’exister que pour quelques secondes, les vagues de rivières sont là en permanence. La meilleure façon d’en décrire une pour quelqu’un qui n’en a jamais vu, c’est de comparer la rivière à un tapis roulant; on reste à la même place éternellement. La vague nous attend, il suffit de faire l’effort d’apprendre comment l’attraper. C’est fréquemment ce qui va choquer les personnes qui ont une bonne expérience en océan, mais qui essaient en rivière. Ils doivent réapprendre*.

La bonne nouvelle dans tout ça? La plupart de l’expérience acquise en rivière sera utile en Océan! Ça commence à devenir intéressant… Mais il faut y mettre du temps!

En effet, il n’est pas rare de voir des personnes qui ont beaucoup d’expérience en rivière avoir de la facilité en océan, un phénomène qui s’explique facilement. La rivière nous apprend comment bien nager et comment avoir une position impeccable sur notre planche de surf. Si nous adoptons une mauvaise position en rivière, les chances sont grandes de rater notre vague, ce qui nous pousse à nous positionner rapidement. En plus, il est possible de passer plus de temps sur une seule vague de rivière que pendant l’entièreté d’une session de surf en océan! Pensez-y, si vous surfez en moyenne 15 secondes sur une vague d’océan, cela signifie que vous devez accumuler 20 vagues consécutives pour accoter le temps d’une seule vague de rivière surfée pendant 5 minutes. La rivière nous donnera donc un grand potentiel pour pratiquer nos virages, notre position et nos manoeuvres. En plus, comme la vague ne change pas, nous pouvons nous concentrer à 100% sur l’amélioration de nos habiletés.

En attendant l'Australie, Nicolas Lauzier pratique à Habitat 67.

En attendant l’Australie, Nicolas Lauzier pratique à Habitat 67. Photo: François Boudrias

Lorsque nous arrivons en océan, notre corps est donc déjà habitué d’être sur la planche. Notre équilibre est naturel et nos bras sont endurcis pour pouvoir passer le breaking point. Nous savons lire les mouvements de l’eau et nous avons de la facilité à prendre les vagues. De plus, nous sommes habitués de rester dans le curl, l’endroit où la vague se brise et où il est optimal de se placer pour surfer. Il y a du courant dans l’eau? Pas de problème, nous en avons vu d’autres! Il ne nous reste qu’à apprendre la lecture de l’océan, l’étiquette des plages les plus crowdées et surtout, il nous reste à bien observer les autres pour apprendre rapidement.

Si vous commencez à surfer et que vous habitez à proximité d’une vague de rivière, je vous reconseille fortement d’aller y faire vos apprentissages. En y mettant de l’énergie et du temps, c’est vos précieux moments en océan qui en bénéficieront. Ce sera alors votre travail de répondre aux curieux qui veulent savoir pourquoi un surfeur montréalais est capable de surfer avec style. On y prend goût.

Vu des airs, il n'y a pratiquement pas de différences entre la rivière et l'Océan.

Vu des airs, il n’y a pratiquement pas de différences entre la rivière et l’Océan. Photo: Alex-Caron-Goudreau

*Si vous doutez du fait que les surfeurs d’océan ont de la misère en rivière, allez voir le vidéo de Donavon Frankenreiter à Montréal (H67). Il la maîtrise bien après un certain point, mais mentionne que c’était beaucoup de travail.

Crédits photo:

Photo principale: Alexandra Côté-Durrer / @alexcdphotography

Photo Habitat 67: François Boudrias

Drone: Alex Caron-Goudreau